Tentative de reconstruction de ma soirée d’hier
Tentative de reconstruction de ma
soirée d’hier jusqu’à maintenant.
J’ai passé la journée à l’école pour
accrocher des travaux. Je reçois un sms d’une fille que j’essaie maladroitement
de draguer depuis quelques temps en lui développant en long et large mes
théories du documentaire. Chaque fois, elle me remballe avec des trucs du
genre : « j’en fous, moi, ce qui m’intéresse, c’est le
littéraire. » Et alors, j’oublie de la draguer et ça part en vrille. Bref,
cette fille, je l’appellerai W, c’est une lettre qu’on utilise pas trop pour
les noms. Elle va passer à l’ERG. Cool. Bon, j’en ai assez d’être là. Je vais
voir si S est toujours dans le local à côté. Non. Je sors et je tombe sur des
étudiants de 3ème : X, T et son copain, et un autre. On déconne
direct sur des sujets ultra lourds. Le sujet vite épuisé, je me retourne. L
sort à ce moment-là de l’école et commence à parler à N d’un truc que je trouve
très tragique, sur les orphelinats, un voyage qu’ils doivent faire et qu’ils ne
sont par certains de faire. Je décide de passer chez moi, parce que N a besoin
d’un DVD du film de Mekas sur la Lituanie dont la gravure était en cours quand
je suis parti, le matin. N me demande de lui amener un casque pour la diffuse
de sa vidéo. Promis. J’arrive chez moi, répond au sms de W pour savoir quand
elle vient. Pas de réponse. OKKKK. Je tente un bricolage sur ma machine pour
tenter un back up qui foire depuis je ne sais quand. Ca a l’air d’aller. Je
retourne à l’ERG. J’oublie le casque. Je croise A, à qui je propose de payer un
coup. Elle me dit de laisser tomber parce qu’en haut ça va être gratos dans 10
minutes. Je monte et je croise C qui déambule mollement au milieu des travaux.
Il m’interpelle sec pour me reprocher de ne pas avoir donné suite à une version
de son dernier film dont il voulait une critique. Effectivement, j’ai négligé
cette chose. L, sa copine, n’est pas loin et bizarrement, elle me nie. Un
rapport entre les deux ? L’idée me traverse l’esprit une fraction de
seconde seulement parce que surgit un étudiant avec des caisses de vin. Je
hurle immédiatement quelque grivoiserie alcoolique « pour détendre
l’atmosphère » trop molle à mon goût et surtout très « polie ».
Casse-bonbon. Un deuxième suit avec la même cargaison. Je hurle encore plus
fort le genre de connerie que j’adore dire, du style : « eh les gars,
regardez, une performance Fluxus » ou je ne sais pas quoi. Je remarque la
copine de A, un autre A, pas la A à qui je proposais de picoler. Cette fille a
toujours été très courtoise avec moi, mais là, si je la remarque, c’est parce
qu’elle vient de faire un véritable bon de 2 mètres, terriblement fâchée de mon
comportement de camionneur. Une réflexion me traverse l’esprit sur les
exigences qu’ont des tas de gens, à mon endroit, sous prétexte que je suis un
intellectuel, de rester civilisé et le fait que des tas d’entre eux sont
choqués par ma vulgarité. Cette vision plate et débile de « l’intello
45dB » a toujours été pour moi un signe d’imbécillité. Je me dirige
« donc » vers le bar. Je croise N. J’ai oublié le casque. Euh, du
plus mauvais effet. J’arrive au bar. Rien n’est prêt pour picoler. Je retourne
dans l’avant salle et S m’interpelle pour me demander si j’ai vu ses photos. Il
y a notamment 2 grands formats accolés : un lit vide près d’une fenêtre
sur l’une et 2 gars en train de jouer à un jeu de sniper sur l’autre. La
symbolique sexuelle me semble criante, didactique. Je le lui dis, mais ne
parviens pas à voir si elle découvre cette aspect à ce moment-ci ou si ça fait
partie d’un moteur secret de l’accrochage. Bref. N est dans les parages et
touchant un de ses autres tirages, voilà qu’un coin se détache du mur. S,
hilare va « réparer » tout en répétant une de ses phrases
fétiches : « oh putain, là, y a quelque chose qui se passe, y a
quelque chose qui se passe ». On explose de rire. J’apprendrai plus tard
qu’elle est morte faite, parce qu’elle a été piquer avec l’autre S (que je
cherchais tantôt) des cartons entier de bière. Je retourne au bar. Je rencontre
A, le gars dont la copine, tout à l’heure a décrété que j’étais un gros porc de
camionneur à gueuler partout « façon Fluxus ». On parle un peu de
l’Italie où il a passé des mois. Ce type est vraiment trop brillant. J’adore
toujours l’écouter me raconter sa vision des choses. Ici, il me parle de
l’urbanisme des villes communistes en Italie et tout. Très convaincant, très
fin. J’adore. Toujours pas de vin, mais l’attroupement augmente. Alors qu’il
développe le sujet, arrive l’autre S, dans un état très avancé d’ébriété. Son
petit jeu, que j’adore : caler un chips entre ses dents et crier très fort
« Terrriip’ » en me crachant le chips à la gueule. Ca a le don
littéralement de dégoûter A. Pas la trajectoire des chips dans ma gueule, mais
le comportement hardcore de S. Je vois ça, et j’ai pas du tout envie qu’A ait,
par exemple, peur de S ou de la situation qui semble dégénérer, parce que, de
mon côté, j’ai commencé à crier sur S que j’allais lui kicker sa gueule s’il
recommençait. Conséquence : il met désormais 5 chips dans sa bouche avant
de me les envoyer au visage. J’essaie d’expliquer à A, que ce n’est rien, que S
est gentil et brillant. Tu parles : tandis que le vin commence à arriver,
et la foule à grossir, l’envie soudaine me vient de pousser violemment S. Il
bouscule une demi douzaine de personnes avant d’aller s’écraser sur le socle
d’une œuvre d’Art. A, dégoûté, quitte. J’aperçois l’autre A, prend des vins
gratos et vais lui en filer un verre. Elle me présente sa copine. Mais S
revient à la charge. Il faut dire qu’il m’a filé une bière et que j’ai commencé
à faire un cocktail « bière dans vin ». Ca donne une chouette couleur
groseille. L’autre N, la copine de C est arrivée. Elle passe dire bonjour à A.
Elle me salue, mais on ne se parle pas. Je commence à expliquer un truc à A sur
les traumatismes infantiles. Pas moyen, car S s’est approché de moi et me coupe
sans cesse la parole en criant « Adornoooooo ». Je le pousse encore
comme dans un pogo. Il va s’écraser sur des étudiants. Les gens sont assez
dérangés par tout ça, ce qui, bien sûr m’amuse beaucoup. Je ne parviens pas à
terminer ma tirade doltoïenne sur la récurrence traumatique, parce que A,
littéralement répugnée par cet étalage de supporter de foot, s’est enfuie de
l’autre côté d’une œuvre d’Art que je contourne pour achever de lui parler,
mais qu’elle continue elle-même de contourner. Bref, on court littéralement
autour de cette œuvre d’Art, elle pour que j’aille faire le hooligan ailleurs,
moi pour finir ce que j’ai commencé, et S pour continuer à me déchirer les
oreilles en gueulant « Adornooo ». Bon, tant pis. La maman de mon
petit vient de passer. Je suppose qu’avec les années, à force de me fréquenter,
elle a été tellement habituée à mes comportements de hooligan en public que,
chose incroyable, elle ne me voit pas, alors qu’elle m’a littéralement frôlé.
Pour la rejoindre, je traverse la foule. Mon attention est attirée par un petit
attroupement dans lequel, je crois, il y a N. Je passe à côté, pour rejoindre
la maman de mon petit et je vois qu’au milieu de l’attroupement, S est accroupi
près d’une grand paquet de crêpes et s’en fout des gros bouts en bouche, comme
un porc. Je continue mon chemin et, à bonne distance, je l’interpelle. Elle me
prend un verre de vin. Je raconte à L, qui l’accompagne, mes excès des derniers
temps. S, la maman d’atomic baby, se moque de moi en me disant que je régresse
à fond depuis qu’elle m’a quitté. J’en profite pour en faire la démonstration
en gueulant un truc du genre « punk’s not dead » avec un grosse voix
caverneuse. Elle me dit qu’elle pense que je suis frappé de Gilles de la
Tourette, mais uniquement dans un registre footballeur-punk. Je trouve la
remarque excellente et, pour abonder dans son sens, je regueule un truc dans le
style « No Futur ». Entretemps, Y, le copain de N, est passé. On s’est
embrassé sans se parler et son pote (enfin je crois que c’est son pote) B,
pareil. Je vois L, que je regarde. Elle me nie farouchement, c’est sûr. De
toutes façons, lancé dans mon Gilles de la Tourette, je n’élucide pas le truc.
En plus, ça fait un moment que je dois partir, pour aller chercher bébé en
province. W ? Oublié complètement. Je propose à S de le ramener, vu
son état. Il me dit « Ah non ! Ah ça, non ! Non, non !
Alors, là, non ! » mais fend la foule en titubant et en poussant les
gens pour m’accompagner quand même. On se casse. En partant, il arrache un
paquet de chips (je n’ai pas vu, en fait) à quelqu’un et, continuant à avancer,
recommence, avec des bouchées entières de chips son jeu de
« Terrriiib » en crachant sur les gens. On passe à côté de 3 ou 4
étudiants assis par terre et S retourne tout le contenu du paquet sur la tête
d’une fille. On fout le camp tandis que je lui crie dessus, 5 fois de suite,
comme un alcoolo défait : « Espèce d’enfoiré ». Alors, qu’en
réalité, je ne suis pas saoul. Pour sortir dans la rue, c’est folklo, parce que
S ne tient plus debout. Il descend les escaliers à 1 mm à l’heure, créant un
gigantesque embouteillage derrière lui. Je continue de proférer des insanités
Gilles de la Tourette au milieu de la foule et à un moment, je pousse S pour
passer. Il manque de se casser la gueule, arrachant au passage une œuvre d’Art
qu’il déchire violemment en en jetant les lambeaux sur les gens. Ca s’énerve.
Je sors le premier. Un étudiant m’interpelle en disant : « ils sont
misérables, ces professeurs » et je braille comme un chartier :
« Art is everywhere » ou un truc du genre. S manque de se faire
casser la gueule et je l’emmène, tandis qu’il me déblatère une théorie sur ce
qu’il faut faire pour donner aux gens qui visitent les journées PO l’envie de
faire de l’Art. En gros : leur montrer des trucs très directs, contenant,
de plus, une bonne dose d’idiotie, voire de connerie, le tout au milieu de
choses très savantes. Je résume très fort sa pensée aussi confuse que redondante,
mais je suis séduit par l’argument. J’acquiesce. Je le ramène chez lui. Merde,
il a oublié une farde et moi d’éteindre un projo. On retourne. Dare-dare, parce
que je suis super en retard pour bébé. Je grimpe 4 à 4 et je croise C, le
copain de N. J’ai à peine le temps de l’embrasser sans lui parler, alors que
j’ai toujours envie de lui dire des trucs. Je vais dans la salle couper le
projo. L, un étudiant de 1ère me dit : « eh, t’as réussi à
placer un 303 dans le Ptit Lu sur Fluxus ». On rigole parce que, la semaine
dernière on est allé à Tourcoing avec les étudiants de vidéo et que je leur ai
passé de l’Acid tout le temps, dont three-o-three de Speedy J, le morceau qui
te butte : une 909 et (à mon avis) deux 303. En tout cas, il y a une 2ème
séquence de 303 qui apparaît dans la 2ème partie du morceau. Pff,
arrache. Bref, on se marre. Je repars en courant rejoindre bébé et dans la rue
… W. Merde. Bon, on se parle et tout. Elle me dit qu’elle peut venir me
rejoindre chez moi après. OK. J’arrive chez la tante de mon petit. Il est tard.
Je mange un bout. J’emmène bébé qui s’endort dans l’auto au bout de 2 minutes.
Je rentre et je le couche. En attendant des nouvelles de W, je commence un
boulot d’analyse dramaturgique pour un pote à moi, D, qui fait une série de 26 minutes
sur le sida. Je lui démonte son scénar, boulon par boulon, travail dans lequel
j’excelle. Je prend un pied monstrueux. Il est 23h30. Appel en absence. W
arrive. On écoute très bas un disque de Surgeon, pure techno fin des années 90.
Trahison de la 303 ? On picole, on fume. Ouïe, Aïe, oui ? Non ?
Surgit bébé. Il veut aller dans « le grand lit » mais absolument avec
moi. Je propose à W de venir dormir avec, ce qu’elle fait. Elle dort toute
habillée, parce qu’elle a froid, tandis que bébé, qui a l’air de trouver normal
qu’une fille soit là, à côté de lui, lui tripote les cheveux toute la nuit. On
se lève hypra tard : 9h00 – Plasticine – Tom & Jerry - mail. W se
réveille à 11h00. Mauvais café, donc avec du lait et du sucre. Elle part. Bain
avec bébé, retour à l’école pour voir de l’Art – Sieste – Je me réveille avant
bébé. Je vais voir mon mail, passe voir le blog de N et je tombe sur sa Tentative de reconstruction de sa soirée d’hier jusqu’à maintenant.
Je lis le truc et suis stupéfait de lire une quasi description de ce que j’ai
vécu, mais comme « non alignée », décrite par un léger strabisme. Retour
à l’école pour démonter l’expo – J’écris à N : on devrait faire le récit
croisé de la soirée - Nuggets/maïs/salade – Tom & Jerry – Dodo – Je
commence ma version de la reconstruction - Bébé vient de surgir pour aller dans
le grand lit avec moi. Mais papa écrit sur son ordinateur, donc je le mets dans
le grand lit tout seul en lui disant que je vais arriver après. J’achève la
description télégraphique de la post-soirée d’hier. Comme je la relis, je
décide d’ajouter une contrainte, pour compenser : avoir le même nombre de
caractères espaces compris que le texte de N, 13002. Je sauvegarde le document.
Il est 23h31.